Souvent mes patient.es veulent pardonner avant d’avoir fait le chemin qui y mène. Je suis toujours touchée car cela témoigne à la fois d’une grande générosité et de la grande souffrance qui est la leur à ce moment là. Cela révèle, aussi, le sentiment d’être prisonnier.e d’une forme d’attachement.
Le pardon n’est pas immédiat comme à partir d’une décision. On peut vouloir pardonner et ne pas y arriver. La tête peut dire « tu dois pardonner pour te libérer » et les émotions s’expriment encore avec la colère, la rancoeur ou la tristesse.
Et puis on sait bien que c’est à soi-même avant tout qu’on doit pardonner. C’est entre soi et soi finalement que la lutte s’opère. La guerre n’est pas avec l’extérieur mais plutôt avec soi-même. Notre conscient, notre inconscient, notre mental, nos émotions, notre enfant intérieur, notre surmoi, tout en nous tire dans un sens et dans un autre. Seule la réconciliation des contraires, seule la paix intérieure viendra à bout de ce système infernal.
Alors seulement à ce moment le pardon peut arriver.
Le pardon à soi, à l’autre, à tous les autres.
Ne nous forçons jamais à pardonner avant l’heure. On ne se débarrasse pas de la rancoeur à coup de pardon imposé à soi-même. Le pardon arrive quand on a fait le parcours et que nous avons dit au revoir aux émotions en lien avec la personne ou l’événement, au revoir à nos attentes avec nos éventuels besoins de justice ou de reconnaissance.
Je dis parfois à mes patient.es qu’ils.elles ne sont pas obligé.e.s de pardonner. Ça libère les uns qui pensent que c’est le passage obligé pour aller bien et ça apaise les autres qui se sentent encore dans des tumultes intérieurs. Je leur dis qu’ils.elles ne sont pas obligé.e.s de pardonner, que parfois la colère nous aide à nous séparer, à nous affirmer, à nous respecter. Je leur dis que le pardon arrive quand toutes les étapes sont franchies. Le pardon est l’aboutissement d’un processus et non pas son point de départ. Mais ce qui est certain c’est qu’une fois le pardon donné et reçu, les âmes sont libérées.
Alors oui il faut être fort pour pardonner et pour le recevoir. Fort au sens non-égotique du terme. Fort au sens de la générosité d’âme.
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